La création de la Métropole du Grand Paris et des grandes intercommunalités a accentué la concentration des activités dans la zone dense. Dans ce contexte institutionnel bouleversé, le Ceser s’est penché sur l’avenir des territoires péri-métropolitains. Un travail d’un an, mené par Nicole Sergent, et dont le rapport a été présenté à l’assemblée consultative début juillet, pose la question suivante : comment abolir les inégalités territoriales et éviter un décrochage des communes situées en périphérie du tumulte métropolitain ?
Sujet transversal aux nombreuses ramifications, à la fois institutionnelle, politique et opérationnelle, avec, en filigrane, plusieurs problématiques liées à l’aménagement urbain. L’avis, présenté le 11 juillet, a été voté à l’unanimité par les membres du Ceser. Il préconise notamment d’"associer l’ensemble de ces territoires aux dynamiques métropolitaines", particulièrement parce qu’ils jouent "un rôle stratégique pour un développement métropolitain durable et résilient", a insisté Nicole Sergent.
Que sont ces territoires ?
Intégrés ou pas à l’aire urbaine de Paris, ces territoires de périphérie se caractérisent d’abord par leur très grande diversité, explique Nicole Sergent. Des villes de banlieue, comme Sarcelles, aux premières villes nouvelles (Cergy, Evry…), en passant par les communes "porte d’entrée" de la région (Roissy, Saclay, Marne-la-Vallée…), ou ces "villes traits d’union" (Nemours, Provins, Rambouillet). Mais surtout de "grands espaces ouverts, plateaux agricoles, boisés, naturels, au cadre de vie attractif et au potentiel culturel et touristique énorme". Incluant de fait des "dynamiques extrêmement variées" entre les EPCI à vocation métropolitaine et les territoires ruraux.
Ces intercommunalités aux tailles très variables (de 15 000 à plus de 100 000 habitants) ont, selon le rapport, un rôle clé à jouer dans l’épanouissement francilien. "On doit beaucoup aux parcs naturels régionaux qui ont contribué à faire face à la pression foncière", illustre la rapporteure. Territoires d’accueil d’infrastructures lourdes – et pas toujours valorisantes – et utiles au desserrement démographique depuis les années 70 (entre 2000 et 2012, 54 % de la construction de logements a eu lieu en périphérie), ils constituent, en outre, d’importantes ressources alimentaires, en eau, énergie, matériaux…
Quels risques ?
Au-delà des inégalités bien identifiées entre l’Ouest et l’Est, à abolir, ou du moins, à maîtriser, le rapport alerte sur d’autres risques. Notamment sur "un décrochage d’une partie de ces territoires", en termes d’activités économiques notamment, car "nous sommes trop focalisés sur les territoires de projets", insiste Nicole Sergent. Il ne faudrait pas qu’ils tombent dans "une spécialisation sociale résidentielle", sachant que sur les 70 000 logements à construire par an en Ile-de-France, 34 000 y sont prévus, dont 24 000 dans l’unité urbaine. Afin de prévenir cette fragmentation croissante de l’espace et une marginalisation importante des territoires ruraux, le Ceser entend renforcer les moyens d’actions de ces intercommunalités aux ressources fiscales souvent insuffisantes pour établir de véritables politiques d’aménagement et construire un projet territorial cohérent.
Quelles solutions ?
"Pour réduire les inégalités sociales et territoriales, les politiques publiques régionales doivent aider à l’émergence de solides projets de territoire portés par les nouvelles intercommunalités, à partir de leurs spécificités". En cela, le Ceser propose six leviers d’actions : "mesurer les risques de nouvelles inégalités territoriales en Ile-de-France" ; "élaborer des stratégies de développement plus ambitieuses pour les territoires péri-métropolitains" ; "développer des politiques d’aménagement plus structurantes" ; "faire émerger des outils d’aménagement mieux adaptés aux réalités des territoires périurbains et ruraux" ; "bâtir les politiques de développement et d’aménagement sur l’inter-territorialité" ; "co-construire l’inter-territorialité sous l’impulsion de la Région Ile-de-France", la "seule à profiter d’une vision globale", ajoute Nicole Sergent. Cette dernière précise que les aménités de chaque territoire doivent être exploitées pour répondre à des enjeux plus transversaux, liés à la transition énergétique notamment (circuits courts, économie circulaire…). Par ailleurs, il est indispensable, selon elle, de fournir à ces EPCI des outils d’ingénierie, d’analyse et d’observation, ne serait-ce que pour favoriser l’inter-territorialité. D’ailleurs, "la CTAP [Conférence territoriale de l’action publique] pourrait établir les lignes directrices de cette inter-territorialité". Enfin, il conviendrait de faire évoluer les outils actuels (syndicats intercommunaux, EPL, politiques contractuelles) et d’intégrer les contrats ruraux de la Région dans une démarche plus globale, "avec une déclinaison territorialisée et plus fine des grands schémas stratégiques régionaux", comme le SRHH.