Comment surmonter les craintes que provoque, chez les habitants comme chez les élus locaux, la notion de densité ? C’est l’exercice auquel se sont prêté promoteurs et urbanistes, lors des Journées d’études professionnelles de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), le 6 février à Paris. "Le problème est que les gens voient des barres et des tours dès qu’on parle de densité", explique Nicolas Michelin, architecte et urbaniste (Nicolas Michelin & Associés). "Ce syndrome est évidemment la conséquence des errements des années 1960. Or, il existe ce que j’appelle une densité vertueuse, porteuse de sobriété, de citoyenneté. Mais il faut la penser". Et de développer le concept, basé sur la mixité et la qualité d’usage, en renaturant le plus possible les îlots construits. Non sans pointer les "difficultés réglementaires", qui ne l’ont cependant pas empêché de remporter quelques consultations, à Bordeaux sur le site du Clos Armagnac, "avec un projet mêlant logements, commerce et équipement, qui monte jusqu’à R+9", ou à Montpellier, sur la ZAC République, porteuse à la fois, selon lui, de "densité extrême" et de qualité de vie.
A l’inverse, il existe une "mauvaise densité", permise notamment par la suppression du coefficient d’occupation des sols (COS) dans la loi Alur. "On se retrouve avec un immeuble de 200 logements au milieu d’une zone pavillonnaire", ce qui ne permet pas un bon fonctionnement de quartier, estime Nicolas Michelin. Karl Olive, maire (LR) de Poissy (78), considère que dans le diffus, les porteurs de projets "denses" devraient à minima prévenir les élus. "On ne peut pas accepter que 80 logements soient construits face à une ZAC qui en fait 2 000". Et de menacer ouvertement : "un promoteur qui ne discute pas avec moi est un promoteur qui ne travaillera plus dans ma ville".
Arnaud Roussel-Prouvost, président de la FPI Nouvelle Aquitaine, préfère braquer le projecteur sur la frilosité des élus : "certains maires nous disent ‘vous m’enlevez deux étages à ce projet’, même le long du tram !". Un comportement qui, non seulement, contrevient aux objectifs de développement durable, qui, à Bordeaux, ont notamment pris la forme du plan "50 000", pour le nombre de logements à produire à proximité des transports en commun, mais qui, en plus, explique le promoteur, "bloque un foncier pour 70 ans".
Paul Delduc, directeur général de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) au sein de l’Etat central, a tenté de faire la synthèse. "Chaque projet, chaque densité sera différente selon le site. Il faut donner à voir une densité qui fait envie, et ce pour aller à l’encontre des envies des habitants et des maires qui veulent des basses densités. Le vrai courage, c’est d’opter pour la rénovation et contre l’étalement".