Bruno Gazeau, président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), et Christiane Dupart, vice-présidente, ont reçu la presse, le 8 septembre, pour faire un point sur l’actualité des transports, à quelques jours du lancement des Assises de la mobilité, le 19 septembre.
Les Assises de la mobilité, qui permettront d’alimenter la loi d’orientation dès 2018, auront pour thématique principale les "transports du quotidien". Le président de la République, Emmanuel Macron, l’avait annoncé début juillet. "Ce n’est pas parce que l’on repart sur du quotidien qu’on a besoin de moins de moyens", prévient la Fnaut. Aujourd’hui, 3 Md€ sont investis pour l’entretien du réseau ; or, 4 Md€ seraient nécessaires, selon la fédération. Cette dernière entend profiter de ces assises pour faire valoir notamment la "nécessité de renforcer la robustesse des services et la fiabilité de l’information voyageurs". Début juillet, paraissait le rapport "A la reconquête de la robustesse des services ferroviaires", auquel a participé la Fnaut. "Une semaine après, l’incident à Montparnasse se déroulait. C’est un sujet d’actualité", a ironisé Bruno Gazeau. Plusieurs propositions en découlent pour renforcer cette robustesse des services et la fiabilité de l’information des voyageurs. Le président explique que "le coût des retards de trains et des trains supprimés s’élève à 1,5 Md€ pour les usagers". L’information voyageur est souvent déficiente, en particulier celle livrée "en situation d’imprévisibilité". Pour y remédier, la SNCF doit travailler en interne pour fournir une information cohérente à tous les niveaux de diffusion (en gare, site web…). Elle pourrait également développer une filière formation propre à l’information (aujourd’hui au sein de la filière commerciale) et produire des scénarios afin de gérer au mieux les déficiences, puisque "l’imprévisible est reproductible".
En outre, la Fnaut se dit favorable à une "fiscalité environnementale" pour assurer le financement des infrastructures. Le rapport du 6 février 2017 de la Commission européenne souligne l’insuffisance des taxations des véhicules polluants. La fédération réclame également que la "mobilité du quotidien soit assimilée à un produit de première nécessité", et qu’ainsi, le taux de TVA soit baissé à 5,5 %.
L’association souhaite aussi ouvrir le marché à la "concurrence régulée entre les opérateurs ferroviaires" et favoriser la "complémentarité organisée des modes, fondée sur les caractéristiques techniques, écologiques et économiques de chaque mode. La loi Notre donne cette compétence de complémentarité et d’intermodalité aux régions". Quant aux nouvelles mobilités, la Fnaut pense qu’elles doivent "s’intégrer dans le schéma des mobilités", et se développer dans l’équité avec les autres modes de transports. Autre thème, la gratuité pour tous des transports publics : elle n’est pas envisageable selon la Fnaut, puisqu’elle entraînerait "la paupérisation du réseau et n’aurait comme conséquence qu’un faible report modal". En cela, une "tarification solidaire", c’est-à-dire liée "aux capacités contributives de chacun et non à son statut", est préférable.
Le dernier point abordé découle d’une étude produite par la fédération sur "le harcèlement sexiste dans les transports publics routiers et les pôles d’échange multimodaux" en 2017. Sujet important, puisque 60 % des usagers sont des usagères et 87 % d’entre elles déclarent avoir subi un harcèlement. Ces chiffres alarmants seront discutés lors des assises, selon la vice-présidente de la Fnaut : "cette remise en question du droit à la mobilité des femmes ne peut être réglée sans l’appui des transporteurs et des pouvoirs publics, aussi bien au niveau local que national". Les dispositifs mis en place pour lutter contre le harcèlement (numéro d’urgence, borne d’appel, présence d’agents) "manquent de visibilité et leur fonctionnalité n’est pas prouvée", explique Christiane Dupart. La sensibilisation des usagers et une formation des agents est primordiale pour lutter contre le harcèlement, "l’ignorance de ce phénomène est un des freins à sa résorption". Les marches exploratoires sont "une initiative fondamentale car elles permettent aux usagères de se réapproprier l’espace public". Cette démarche permettrait d’adapter les aménagements urbains aux femmes et à leurs besoins en restituant leurs paroles. "Encore faut-il les écouter", déplore Christiane Dupart.
► A noter : la Fnaut fait peau neuve avec un nouveau logo et une nouvelle brochure. L’objectif est de clarifier et réexpliquer le rôle de cette fédération aux élus régionaux et parlementaires. Composée de 160 associations, elle représente les usagers auprès des pouvoirs publics. Bruno Gazeau insiste sur l’impact que la Fnaut peut avoir sur les décisions, notamment grâce à "sa large visibilité médiatique".