C’est un emblème du Grand Paris et d’une nouvelle "manière d’habiter la métropole du 21e siècle" que les faiseurs de la nouvelle tour d’Aubervilliers sont venus, en nombre, présenter le 11 février. Les architectes de l’Atelier Castro Denissof Associés et les équipes de Nexity, entourés des élus – de la ville et de l’agglomération Plaine Commune -, ont tour à tour fait part de leur émotion de voir "enfin" grimper à 50 m de haut le bâtiment Emblématik, dans un quartier en plein renouveau, symbole, lui aussi, de la métropolisation. Le projet, de près de 240 logements au total, est sorti de terre "après dix années difficiles", relate Jean-Philippe Ruggieri, directeur général délégué de Nexity. Une décennie de "partage de pensées" entre les architectes et ce qui a été pour ces derniers "nettement plus qu’un promoteur", selon les mots de Roland Castro, pour livrer en ce mois de février 2019, la première concrétisation de leur concept : "habiter le ciel".
Un logement pour chacun
Le "village vertical" – dénommé ainsi dès les premières esquisses – entend rompre avec le sens traditionnel de la tour, que l’imaginaire associe à des bâtiments monolithiques, aux façades brutales et à l’empilement de cellules de logements toutes identiques. Emblématik s’organise autour de quatre jardins partagés, tous les quatre niveaux, soit un espace commun à une vingtaine de logements. "La tour en R+18 réinvente le rapport à l’extérieur", explique Sophie Denissof, architecte. Les habitants sont "tenus par ces cours-jardins", comme "un premier plan confortable" avant le lointain.
D’après elle, la typologie des duplex, les balcons, loggias en double hauteur (5 m) et terrasses donnent du rythme en façade, et une identité repérable, et c’est cette "individualité" qui permet aussi "une meilleure appropriation" du logement. D’autant que les appartements n’ont pas tous la même composition. C’est un projet "ordonné et à la fois plein de singularités". L’agence Castro Denissof travaille depuis plusieurs années sur les grands ensembles. Il fallait sortir de cette "impression d’être les mêmes à tous les étages, sans confort et sans lien avec l’extérieur". A "l’habitat pour tous", Castro préfère "l’habitat pour chacun". "Il faut absolument que l’endroit où tu habites soit supportable, et soit même un objet de désir dans le regard des autres".
(c) Vincent Bourdon / Atelier Castro Denissof Associés
Emblématik se décompose en trois parties : une résidence étudiante de 113 logements (gérés par Espacil), un immeuble de 40 logements sociaux (OPH d’Aubervilliers) et la tour de 50 m comprenant 88 appartements en accession (60 % des acquéreurs sont des primo-accédants et 68 % ont moins de 40 ans), vendus à 4 300 €/m2 environ. "L’utile et le désirable ne seraient rien sans l’abordable", souligne Jean-Philippe Ruggieri, qui revendique un projet – porté depuis longtemps par la direction de Nexity, Alain Dinin et Jean-Luc Poidevin – qui "concilie densité, compacité et développement durable". Une "économie du sol" responsable, selon lui, qui, en réduisant les charges foncières, a permis de trouver un équilibre économique. "Sans la maire d’Aubervilliers, ni le président de Plaine Commune, nous ne serions pas là", convaincu, par ailleurs, qu’un tel projet répond aussi à une "vision politique".
L’architecture politisée
Pour Patrick Braouezec, président (PCF) de Plaine Commune, la tour illustre "un urbanisme à dimension humaine, sur rue, et plurifonctionnel". Elle est aussi "un repère dans le paysage urbain" dans un quartier en mutation et qui forme "une nouvelle centralité du Grand Paris". Pour Meriem Derkaoui, maire (PCF) d’Aubervilliers, "elle contribue à la réflexion et au verdissement de notre ville avec ses jardins suspendus".
Emblématik borde la place du Front populaire d’Aubervilliers, desservie, à ses pieds, par une station de métro. "La place se termine, le campus Condorcet sera livré cette année, plusieurs opérations d’Icade sont en cours au sud…", rappelle Catherine Léger, présidente de la SEM Plaine Commune Développement, aménageur de la ZAC Nozal dans laquelle s’insère l’ensemble. La tour dessine une entrée de ville, à l’angle des rues Waldeck Rochet et Gardinoux. Depuis ses balcons et terrasses, elle donne à voir Montmartre, La Défense et la Plaine Saint-Denis.